Assurance maladie propositions 2025

L'Assurance maladie a publié en juillet 2024 son rapport au ministre chargé de la Sécurité sociale et au Parlement sur l’évolution des charges et des produits de l’Assurance Maladie au titre de 2025 (loi du 13 août 2004) pour améliorer la qualité du système de santé et maîtriser les dépenses.

Nous partageons le chapitre 8.1 p. 209 :  Centres de santé : perspectives d’évolution du modèle économique

Le développement constant des centres de santé malgré un modèle économique fragile

Les centres de santé, structures sanitaires de proximité, sont des acteurs indispensables à la réduction des inégalités d’accès aux soins et à l’amélioration de la prise en charge des patients sur l’ensemble du territoire. Ils appliquent les nomenclatures « de ville » applicables aux professionnels de santé libéraux et, en complément, un accord national des centres de santé a été signé le 8 juillet 2015 entre les organisations représentatives des gestionnaires des centres de santé et l’Assurance Maladie. Depuis, cet accord a été complété par cinq avenants dont le dernier en date a été conclu le 30 novembre 2023.

En 2023, 2 899 centres de santé sont adhérents à l’accord national. Ils sont répartis de la manière suivante :

  • 1 252 centres de santé dentaire ;
  • 448 centres de santé infirmiers ;
  • 333 centres de santé médicaux ;
  • 866 centres de santé polyvalents (avec ou sans auxiliaire médical).
Tableau 21 évolution du nombre de centres de 2020 à 2023

Source : Cnam (plateforme e-CDS)

On observe ainsi une majorité de centres de santé dentaire. Pour réguler leur installation et dans les suites des dispositions prévues par la convention nationale des chirurgiens-dentistes libéraux, l’avenant 5 à l’accord national des centres de santé a instauré un principe de régulation du conventionnement des centres de santé situés en zones "non prioritaires" (terme pour désigner les zones sur-dotées) en chirurgiens-dentistes.

Ainsi, à partir du 1er janvier 2025 :

  • plus aucun conventionnement pour l’installation d’un nouveau centre de santé dentaire dans les zones non prioritaires ne sera possible ;
  • les centres de santé dentaire et les centres de santé polyvalents avec activité dentaire installés en zones non prioritaires ne pourront plus augmenter leur nombre d’équivalents temps plein (ETP) chirurgiens-dentistes omnipraticiens salariés.

Les centres de santé demeurent fortement concentrés en Île-de-France (923 centres de santé adhérant à l’accord national et ayant complété les informations relatives à la rémunération sur la plateforme nationale e-CDS en 2023). Ils sont également nombreux en Auvergne-Rhône-Alpes (278 centres de santé adhérant à l’accord national et ayant complété les informations relatives à la rémunération sur la plateforme nationale e-CDS en 2023).

Une patientèle plus précaire et moins suivie par un médecin traitant prise en charge dans les centres de santé Les centres de santé se distinguent nettement des autres structures et cabinets libéraux, notamment par la spécificité de la patientèle. En effet, le degré de précarité sociale de la patientèle ressort comme étant plus nettement élevé que pour l’exercice libéral au niveau national.

En moyenne, les centres avaient un taux de patientèle bénéficiant de la Complémentaire santé solidaire et de l’aide médicale de l’État (AME) de 18,2 %, soit près du double du taux moyen national. En effet, en 2022, les taux moyens nationaux de patientèle bénéficiant de la Complémentaire santé solidaire et AME étaient respectivement de 9,6 % et de 0,4 % en 2022, soit un taux moyen national global de 10 %.

Figure 98 : Part des patients bénéficiant d’une prise en charge par l’AME, de  la Complémentaire santé solidaire (AME/C2S) et l’affection longue durée (ALD) vus par un centre de santé, en 2022

La patientèle fréquentant les centres de santé semble être moins fréquemment suivie par un médecin traitant. En centre de soins infirmiers, 10 % des patients n’ont pas de médecin traitant et seul 1,2 % des patients ont déclaré le centre de santé comme médecin traitant. En centre de santé polyvalent ou médical, 16 % des patients n’ont pas de médecin traitant et 12,6 % ont déclaré le centre de santé comme médecin traitant.

Parmi les patients avec au moins un acte ou une consultation en centre de santé en 2022, 9 % ont déclaré le centre de santé comme médecin traitant. En ce qui concerne la patientèle "médecin traitant", le médecin n’est pas déclaré individuellement comme étant le médecin traitant du patient, mais, en centre de santé, c’est la structure dans son ensemble qui est déclarée médecin traitant du patient.

Ce faible nombre de déclarations du centre de santé comme médecin traitant s’explique en partie par la procédure de déclaration d’un médecin traitant exerçant en centre. En effet, jusqu’à récemment, les médecins salariés de centre de santé n’avaient pas accès à un téléservice de déclaration en ligne du médecin traitant ; la déclaration était uniquement papier, ce qui donnait lieu à des retards voire des abandons face à la lourdeur de la procédure. Cela impliquait par ailleurs une perte de recettes pour les centres de santé s’agissant du forfait "patientèle médecin traitant"

Un modèle économique fragile

L’équilibre économique et financier des centres de santé dépend de multiples facteurs et la productivité des médecins est l’un des principaux déterminants de cet équilibre.

En ce qui concerne l’activité, une grande variabilité entre la file active et la patientèle "médecin traitant" des médecins libéraux et des médecins salariés exerçant en centre de santé est observée. En effet, le ratio médian de la file active "médecin généraliste" pour les centres de santé s’établissait à 1 481 patients avec de forts écarts de distribution : un quart des centres avaient une file active "médecin généraliste" supérieure ou égale à 2 655 patients en 2022 et un quart une file active inférieure à 972 patients. La file active médiane pour les médecins généralistes libéraux était de 1 556 en 2022. On constate également une forte variabilité pour les médecins libéraux : un quart des médecins généralistes installés avaient une file active supérieure ou égale à 2 027 en 2022, tandis qu’un autre quart avaient une file active inférieure à 1 170 la même année.

En lien avec cette activité, mais également avec des structures de charge de ces centres, l’équilibre économique et financier des centres de santé polyvalents est aujourd’hui fragile ; selon les données déclaratives disponibles sur la plateforme Atih, le déficit moyen d’exploitation s’établit à près de 10 % des dépenses ; celui-ci est cependant très variable, mais seul un tiers des centres de santé dégagent un excédent. Face à ces constats, l’Inspection générale des affaires sociales (Igas) réalise actuellement des travaux sur le nouveau modèle économique des centres de santé.

8.1.2. Des rémunérations forfaitaires spécifiques des centres de santé en augmentation

La rémunération forfaitaire spécifique des centres de santé

L’accord national des centres de santé prévoit le versement d’une rémunération forfaitaire spécifique conditionnée à l’atteinte d’indicateurs socles et prérequis (accessibilité du centre, fonction de coordination, système d’information labellisé par l’Agence du numérique en santé – ANS).

Au titre de l’année 2023, 2 241 centres de santé (ou regroupements de centres) obtiennent une rémunération, soit 79 % des centres de santé conventionnés (80 % des centres de santé polyvalents ; 72 % des centres de santé médicaux ; 81 % des centres de santé dentaire ; 76 % des centres de soins infirmiers).

Au total, pour ces structures, l’Assurance Maladie a versé 95 millions d’euros au titre de 2023 contre 94,5 millions d’euros au titre de 2022 et 71 millions d’euros au titre de 2021.

En moyenne, les centres de santé ont perçu une rémunération égale à 42 645 euros au titre de 2023 (versée en 2024).

Le montant moyen par type de centre de santé reste plus important en centre de santé polyvalent avec 70 747 euros. On constate une baisse de la rémunération pour les centres de soins infirmiers (qui s’explique par la diminution continue du nombre de centres de santé en activité).

Autres rémunérations forfaitaires

Tableau 23 : Évolution des montants de la rémunération sur objectifs de santé publique (Rosp) versée aux centres de santé (CDS), de 2017 à 2023

Outre la rémunération forfaitaire fixée à l’accord national, les centres de santé peuvent prétendre aux rémunérations forfaitaires conventionnelles prévues par la convention nationale des médecins libéraux.

Depuis 2017, le nombre de centres de santé bénéficiant de la rémunération sur objectifs de santé publique (Rosp) a été multiplié par 2,6.

8.1.3. Proposition d’évolution du modèle économique des centres de santé polyvalents

L’équilibre économique et financier des centres de santé polyvalents est aujourd’hui fragile ; selon les données déclaratives disponibles sur la plateforme Atih, le déficit moyen d’exploitation s’établit à près de 10 % des dépenses ; celui-ci est cependant très variable, mais seul un tiers des centres de santé dégagent un excédent.

Cet équilibre dépend en effet de multiples facteurs et en premier lieu de la productivité des médecins. Il est donc notamment proposé de lier davantage les rémunérations des centres de santé sur l’activité réalisée.

À la suite de l’avenant 5 à la convention nationale (signature en décembre 2023), l’Assurance Maladie souhaite engager dans les prochains mois des discussions avec les partenaires conventionnels afin d’adapter le modèle économique des centres dans les suites de la mission de l’Igas sur l’"Évaluation du modèle économique des centres de santé pluriprofessionnels" et en tenant compte des premiers résultats des expérimentations

"article 51"

Par ailleurs, l’analyse de la situation économique, financière et de l’organisation actuelle des centres de santé devrait amener l’Assurance Maladie, en concertation avec les représentants des centres de santé, à faire émerger un nouveau modèle de financement pour les centres de santé dont les professionnels s’engagent, organisent et mettent en pratique le partage des tâches notamment entre médecins généralistes et infirmiers.

Enfin, cette négociation devra permettre de mieux prendre en compte la spécificité de la patientèle des centres de santé en renforçant les rémunérations liées à la précarité.

Quand
Lundi 30 septembre 2024
CNAM Rapport charges et produits 24 - 25